Auguste BONHEUR • Arromanches
(Bordeaux, 1824 – Bellevue, 1884)
© Crédits iconographiques Région Normandie /Inventaire général/Patrick Merret – Léonie Hamard
Description :
vers 1862
Huile sur toile, 24,2 x 41,3 cm
Dimensions avec cadre : 39 x 55,6 cm
S.b.g.
Numéro d’inventaire : PN 993.8.1
Figures les plus emblématiques d’une tribu de peintres, Rosa et son frère Auguste semblent avoir traversé leur siècle sans se départir de la leçon académique apprise auprès de Léon Cogniet et, plus encore, de leur père Raymond Bonheur. Comme sa soeur, Auguste consacre sa vie au règne animal, ce qui, paradoxalement, le protège de toutes les turpitudes et tentations de la nature.
Dès l’âge de 21 ans, en 1845, il est admis au Salon avec un tableau représentant des enfants faisant la chasse aux hannetons, modèle de réalisme édifiant dont l’image ne provient certainement pas de l’observation en plein air mais plus de la copie d’après la gravure ou la lithographie, ou encore de l’interprétation littéraire.
Lorsqu’il s’adonne aux paysages de l’Auvergne, qui auront sa faveur durant toute sa carrière, Auguste mérite bien l’apostrophe de Paul de Saint-Victor, parue dans la presse en 1861, qui souhaite lui décerner un «prix de propreté25 ». Dans le Journal des débats de la même année, Delécluze ajoute qu’il n’y a pas chez lui de hasard de coup de pinceau.
Cet art consommé en fait, comme sa soeur Rosa, un adepte forcené du Salon. Il plaît aux Anglais et aux Américains qui s’arrachent et paient cher ses tableaux. Le travail de gravure forge chez les Bonheur une technique de dessin et de modelé qui semble ignorer la subjectivité de la perception visuelle, l’effet de l’air et de la lumière sur la forme. Ainsi Raoul Navery, dans le « Salon de 1868 », dit à propos d’un Troupeau de moutons : «Le seul reproche que nous adressions à Monsieur Bonheur est de donner aux bêtes qui s’éloignent davantage la même valeur qu’à celles qui se trouvent en avant, et de soigner les détails d’une façon identique; peut-être exagère-t-il aussi la fraîcheur du museau rose de ses moutons.>
On accorde à Auguste Bonheur une manière plus dure et tranchée. Cela lui a probablement permis de réaliser quelques-unes de ses esquisses, telle cette vue d’Arromanches peinte lors d’un séjour à Trouville et a Villers en 1862. Sous l’effet d’une nature sans concession, sauvage, inapte aux artifices, le peintre soudain se dépouille de ses partis pris et restitue, avec vérité et modestie, la grandeur et la simplicité du bord de mer comme rarement il aura l’occasion de le faire.
Cette fois, Bonheur a cru pouvoir oublier cette maxime rappelée par Arsène Houssaye : «L’idéal doit s’interposer entre l’art et la nature.»