Paul HUET • Trouville, "reflets d'orage"
(Paris, 1803 – 1869)
© Crédits iconographiques Région Normandie /Inventaire général/Patrick Merret – Léonie Hamard
Description :
vers 1865
Huile sur toile, 24,4 x 46,1 cm
Dimensions avec cadre : 36,9 x 56,2 cm
Numéro d’inventaire : PN 996.1.1
Paul Huet a du paysage une approche analytique, qu’il s’agisse d’espaces ouverts – ciels d’orage, ciels roses, la lande – ou d’espaces fermés – les brisants, reflets d’orage, le gouffre. Le peintre creuse une matière spécifique avant même de camper un sujet. Ce qui est vrai pour les esquisses, où l’intimité du geste est gage de liberté, le reste pour les oeuvres publiques telles la Grande marée envoyée au grand Salon de 1838 et l’Inondation de Saint-Cloud primée à l’Exposition universelle de 1853, qui plaisait tant à Delacroix (« Votre Grande inondation est un chef-d’oeuvre, elle pulvérise la recherche des petits effets à la mode»).
Ce ciel d’orage à Trouville, dont la date d’exécution n’est pas vraiment connue puisque les esquisses sur ce sujet se poursuivent entre 1830 et 1853, apparaît presque comme un paysage mental, une vision pourvue d’une expressivité presque héroïque. Le titre indique bien à quel point le peintre voit de l’autre côté de la réalité et qu’il capte tantôt des essences, tantôt des accents, des ponctuations qui déréalisent le sujet pour ne plus laisser place ici qu’à l’emportement lyrique. L’oeuvre peut se rapprocher des Brisants à la pointe de Granville du musée du Louvre, présentés au Salon de 1853. Contrairement à Corot à la même époque, Huet n’emprunte de la filiation avec Bonington que l’évidence du dessin, la densité plutôt ramassée des volumes ; il exploite un filon plus rubénien où la puissance des masses le dispute à l’emportement de la touche et néglige les détails.
Les paysages de Huet démontrent qu’en pleine vague de réalisme, il n’y a pas deux peintures, la bonne, celle qui exalte la vérité et l’idéal autour d’un vrai sujet identifiable dans ses références à l’histoire ou aux faits des hommes, et l’autre, celle des petites esquisses, privées, qui n’a pas accès à la représentation et se voit reléguée dans le désordre de l’atelier avec les pinceaux et les palettes ou bien donnée aux intimes et à l’entourage.